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L’éco-anxiété, un trouble psychique devenu un phénomène social
Publié le :
25/10/2021 09:38:16
Catégories :
Développement personnel
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La Presse en parle

La peur, l’anxiété et la dépression
En tant que psychologues, nous savons que les troubles psychiques les plus répandus dans la société occidentale sont l’anxiété et la dépression. Ce sont les raisons pour lesquelles le plus de personnes consultent un spécialiste de la santé mentale. Si l’angoisse est plutôt considérée comme une émotion passagère, elle peut aussi être le résultat du trouble anxieux généralisé dont souffre une personne. En psychopathologie, nous savons que le trouble anxieux généralisé figure parmi les troubles les plus difficiles à guérir, contrairement aux phobies qui sont liées à la peur ou le dégoût d’un objet précis comme les araignées et sont en principe facilement traitables avec les techniques actuelles.
La peur, quant à elle, est une alarme dans notre cerveau qui nous avertit qu’un danger nous guette. C’est une émotion tout à fait normale. Elle est nécessaire à notre survie. La peur est en principe une émotion assez brève qui survient face à un stimulus identifié, comme la peur qui nous traverse lorsque nous rencontrons un serpent sur la route lors d’une promenade en forêt. La réponse à la peur consiste en la fuite, l’attaque ou la sidération. L’anxiété est un état différent de la peur, car il s’agit d’une crainte présente en nous sans stimulus identifiable. L’anxiété est liée à des menaces diffuses, mal identifiées, incontrôlables ou inévitables.
Le comportement humain à l’égard de l’écosystème est-il logique ?
Dans la psychologie environnementale, lorsqu’on étudie les comportements humains, on peut être surpris par certains contrastes. En effet, la peur du loup, du lion, des requins, des serpents, des araignées et de toutes sortes de bêtes sauvages reste fortement ancrée dans notre psychisme et sont des peurs largement exploitées dans les films d’horreur à succès. Or, les statistiques nous montrent que les requins (essentiellement le Grand requin blanc et le requin bouledogue) ainsi que les loups sont responsables chacun d'environ dix morts recensées chaque année dans le monde, ce qui représente en fait 0,000000001 % sur 8 milliards d’habitants. Malgré sa réputation de mangeur d'hommes, le lion ne tue que seulement une centaine d'hommes chaque année.
Concernant la pollution de l’air par les particules fines issues des énergies fossiles, les chercheurs de Harvard arrivent eux à un total de 8,7 millions de morts prématurées sur la base de l’année 2018 dans le monde, soit un décès sur cinq dans le monde. En comparaison, la pollution de l’air tue 20% de la population mondiale selon l’étude d’Harvard et les grandes bêtes sauvages quelques centaines par année. Mais qui a peur des particules fines ? Avez-vous déjà eu une peur effroyable ou une panique généralisée des particules fines en vous promenant sur le trottoir en allant à votre travail ? Avez-vous déjà fait des cauchemars au sujet de celles-ci ? Existe-il des films d’horreurs avec des être humains qui sont poursuivis par des particules fines ? Ce genre de peur ou d’anxiété est bien plus rare statistiquement, or c’est une des grandes causes de décès dans le monde.
Les biais cognitifs du cerveau humain
Cela signifierait-il que notre cerveau a des bugs, car il surévalue la peur du requin et ignore complètement le danger des particules fines ? Probablement que oui, sachant que notre cerveau est sujet à de nombreuses distorsions mises à jour par la psychologie et les neurosciences ces dernières années. Peut-on considérer que dans la société moderne, notre cerveau fonctionne comme au temps des chasseurs-cueilleurs, c’est-à-dire qu’il a peur des loups et des requins, mais banalise totalement le danger des particules fines qui lui est bien réel ? Probablement que oui, car la psychologie est une science qui donne un certain nombre d’indices que le cerveau ne réagit pas toujours de manière rationnelle et conforme au danger réel. De très nombreux biais cognitifs ont été mis en évidence pas la science ces dernières années. Pouvons-nous donc affirmer que notre cerveau est inadapté face au véritable danger de la société actuelle, comme la pollution, la crise climatique et la perte dramatique de la biodiversité ? Effectivement, si notre cerveau était bien adapté au danger réel, nous devrions avoir beaucoup plus peur de la disparition des lions et des requins plutôt que de se faire attaquer par l’un deux lors d’une de nos randonnées. En effet, la perte de la biodiversité est dramatique actuellement à tel point que beaucoup de scientifiques parlent de la 6ème extinction de masse. Mais certains sondages suisses sur l’attitude de la population concernant la biodiversité montre que la réponse majoritaire est que «tout va bien comme d’habitude». Peut-on en conclure que notre cerveau serait donc totalement distordu ou biaisé dans notre monde moderne face à des dangers relativement nouveaux par leur ampleur générale, leur aspect plus multiforme, complexe et qui se produisent sur de longue durée?
Apparition du phénomène de l’éco-anxiété
En fait, pas vraiment non plus. Ces biais cognitifs ou distorsions de la réalité intéressent de plus en plus les chercheurs en psychologie environnementale. Depuis plus de 10 ans, de nombreux articles font référence à l’éco-anxiété ou solastalgie. L’éco-anxiété peut se définir de manière simple en une manifestation d’anxiété par rapport à la dégradation de l’écosystème, à savoir principalement la perte de la biodiversité, la crise climatique et la pollution. L’anxiété est une alarme dans notre cerveau qui nous avertit qu’un danger pas très bien défini et plus ou moins durable nous guette. C’est une émotion tout à fait normale. Elle est également nécessaire à notre survie. Comme la peur, elle peut nous mobiliser à l’action afin d’éloigner un danger réel et diffus. Dans ce cas, c’est plutôt une réaction saine et adaptée. Mais si l’éco-anxiété devient envahissante et perturbe de manière importante les activités quotidiennes, professionnelles ou scolaires d’une personne, comme ces élèves qui ne fréquentent plus l’école et qui vivent recroquevillés dans leur chambre en raison de leur perte de confiance en l’avenir, alors nous nous pouvons constater une détresse importante et un grand désespoir. Nous pouvons même nous approcher du diagnostic d’un trouble psychique dans certains cas. En résumé, l’éco-anxiété peut être une réaction malsaine si elle mène à une grande détresse et à un blocage général de personne et une réaction saine et adaptés si elle pousse à l’action, c’est-à-dire à la participation à la transition écologique.
L’éco-anxiété est-elle néfaste ?
Le professeur Tobias Brosch, en 2015, a fondé le laboratoire de décision et de comportement durable à l’Université de Genève. Il y est aujourd’hui professeur associé et dirige le groupe de recherche en psychologie du développement durable. Lors d’un interview, ce dernier a donné les points importants qui ressortent de l’éco-anxiété comme phénomène social. Il précise à juste titre que les émotions ne sont pas des phénomènes étranges à éviter le plus possible afin de paraître «raisonnable», mais que ce sont des moteurs de l’action d’un individu et qu’elles sont indispensables à un bon raisonnement adapté à la situation. Et ressentir un mal-être important au sujet de la dégradation de l’environnement est un phénomène normal et naturel. Son observation est que cette anxiété est ressentie par des personnes qui n’ont pas personnellement subi d’impacts directs du changement climatique. Et ceci est étonnant au premier abord. Les chercheurs du domaine des science affectives constatent que l’éco-anxiété est utile et saine si elle mobilise les ressources des personnes et les poussent à agir pour lutter contre les causes du réchauffement climatiques ou la perte de la biodiversité dues à l’action humaine. Donc l’éco-anxiété favorise la protection du climat.
Transformer l’écoanxiété en action positive grâce au travail qui relie
Une étude américaine montre que 51% des personnes considère la crise climatique comme une source de stress et une autre que 10% des personnes ont des blocages dus à la même cause qui peut donner lieu à un diagnostic clinique. Les campagnes d’information médiatiques trop inquiétantes sur le climat peuvent trop impacter émotionnellement une partie de la population qui se sent alors paralysée. Dans ce cas, l’excès d’informations anxiogènes sur la situation écologique est contre-productive, car elle ne pousse pas ces personnes à l’action. Les ateliers de sensibilisation à l’écologie vécus en petits groupes, comme le travail qui relie, offre l’avantage d’inclure un travail approfondi sur les émotions et les biais cognitifs inhérents à la nature humaine afin d’aboutir à un plan d’action personnalisé. Même si ces ateliers sont des réponses adaptées pour transformer des émotions ou sentiments désagréables, comme l’éco-anxiété, la peur, la tristesse ou la colère en action positives pour la société, un risque d’aggraver la situation de détresse des participants reste néanmoins présent. Le travail sur les émotions délicates implique donc un cadre de sécurité et une expérience qui préservent le bien-être général des participants.
Par Marc Roethlisberger,
Auteur de Prévention des risques psychologiques lors d'ateliers de sensibilisation à l'écologie, ed Souffle d'Or le 14/09/2021